| Romantisme (art), dans le domaine des beaux-arts,  mouvement qui a succédé au grand élan littéraire romantique de la fin du XVIIIe siècle  en Europe du Nord et qui s'est développé dans toute l'Europe et aux états-Unis  jusque dans les années 1850.S'il  ne peut être identifié à un style, une technique ou une attitude unique, le  romantisme, notamment en peinture, affirme cependant son unicité à travers les  thèmes dont il s'inspire : communion avec la nature dans ce qu'elle a de  sauvage et de mystérieux, plongée dans l'inconscient, refus de toute visée  moralisante, goût pour l'irrationnel, intérêt porté à l'époque médiévale. Alors  que l'art classique ou néoclassique privilégie la clarté de l'expression et la  retenue des émotions, l'art romantique cherche de façon caractéristique à  exprimer par la suggestion, des sentiments intenses, mystiques ou fugitifs.
 Le contexte du XVIIIe siècle
 La  sensibilité romantique ne s'est pas développée après le néoclassicisme et en  réaction contre lui, mais bien parallèlement à celui-ci, dès le milieu du XVIIIe siècle.  Caractérisée par le refus de toute moralisation au profit d'un goût prononcé  pour l'irrationnel, cette sensibilité naît d'abord en Grande-Bretagne avec les  poètes Edward Young ou encore William Collins et Thomas Gray. Elle se développe  ensuite largement dans les littératures anglaise, allemande, puis française  incarnée par l'œuvre de Jean-Jacques Rousseau. La poésie romantique apparaît en  Allemagne et en Grande-Bretagne dans les années 1790 où le passage de la raison  au sentiment et à l'imagination commence à se refléter dans les arts  plastiques : illustrations visionnaires de William Blake, scènes  fantastiques et cauchemardesques de Johann Heinrich Füssli, sombres gravures de  monstres et de démons de Francisco Goya.
 France
 En  France, la naissance du romantisme coïncide avec les guerres napoléoniennes  (1799-1815). Les poèmes ossianiques de Macpherson, qu'apprécie particulièrement  Bonaparte, livrent leurs thèmes aux peintres transfuges du néoclassicisme comme  Girodet-Trioson, François Gérard et Antoine Gros, qui s'inspirent également des  événements contemporains. Si Gros, dans une série de tableaux à la gloire de  Napoléon, redonne à la couleur sa prééminence à travers la théâtralisation des  champs de bataille, c'est avec Théodore Géricault que la vision romantique de  la guerre, de la mort et de la folie prend les couleurs de la réalité la plus  atroce (Cuirassier blessé quittant le champ de bataille, 1814, Musée du  Louvre, Paris). Le Radeau de la Méduse (1819, Musée du Louvre) dépeint  de façon paroxystique la souffrance humaine et l'inexorabilité de la destinée,  thème qui trouve écho chez le peintre Eugène Delacroix, avec les Massacres  de Scio (Musée du Louvre), tableau réalisé en 1824, l'année même de la mort  de Géricault. Trois ans plus tard, le Salon de 1827 marque l'apothéose du  romantisme en même temps qu'il porte à son comble la polémique à propos de  l'esthétisme. Au raffinement exacerbé d'un François Gérard s'opposent la  violence et l'érotisme de la Mort de Sardanapale (1827, Musée du Louvre)  de Delacroix. Si cet artiste emprunte souvent ses sujets à la littérature, il  s'attache à transcender ce qu'ils contiennent de littéraire ou de didactique en  créant, par l'usage de la couleur, un effet d'énergie et d'émotion pures  comparable à celui que procure la musique. Ainsi, rejetant la prépondérance  accordée par les néoclassiques à la forme et aux contours, Delacroix  s'accorde-t-il, avec la Mort de Sardanapale, inspirée d'une œuvre de  lord Byron, une totale et entière liberté dans le traitement de la couleur ou  la représentation des corps. Si la violence de la scène et son caractère  mortifère — face à ses ennemis, le roi Sardanapale fait exécuter ses  favorites puis se suicide — choquent les critiques, ils font cependant de  cette œuvre la toile romantique la plus authentique de Delacroix. De nombreux  artistes, comme Eugène Devéria (Naissance d'Henri IV, 1827, Musée  du Louvre), Paul Delaroche (Jeanne d'Arc interrogée dans sa prison par le  cardinal de Winchester, 1824, Musée des Beaux-Arts, Rouen), Léon Cogniet (le  Massacre des Innocents, 1824, Musée des Beaux-Arts, Rennes), ou encore  Horace Vernet, reprennent à leur compte la thématique romantique, mais restent  à mi-chemin de la manière violente de Delacroix et de la sagesse classique d' Ingres, pour ne pratiquer finalement qu'un  romantisme de « bon ton ».
 Allemagne
 à  l'instar de la poésie et de la philosophie, la peinture romantique allemande  puise ses sources dans l'idée d'une nature issue d'une manifestation divine.  Elle donne naissance à une école de peinture de paysages symboliques, à  l'origine de laquelle figurent les tableaux mystiques et allégoriques de  Philipp Otto Runge. Le principal représentant de ce courant, considéré  également comme le plus grand peintre romantique allemand, est Caspar David Friedrich , dont les paysages  oscillent entre un subtil sentiment mystique et une impression de mélancolie,  de solitude, voire d'aliénation. Son pessimisme romantique s'exprime le plus  directement dans le Naufrage de l'espérance — la Mer de glace (1823, Kunsthalle, Hambourg), où l'épave d'un navire naufragé, à peine visible  sur une pyramide de glace, apparaît tel un monument élevé au triomphe de la  nature sur les aspirations humaines.
 Les  nazaréens, groupe d'artistes qui tentent de retrouver le style et l'esprit de  l'art religieux médiéval, ouvrent une autre voie au romantisme allemand. Le  principal représentant de celui-ci est Friedrich Overbeck. Parmi les artistes  de la tradition romantique allemande figure encore l'Autrichien Moritz von  Schwind, qui emprunte ses thèmes à la mythologie et aux contes de fées  germaniques.
 Grande-Bretagne
 En  Grande-Bretagne comme en Allemagne, les paysages où regorgent les émotions ou à  Dimension métaphysique deviennent le principal mode d'expression de la peinture  romantique ; les peintres britanniques innovent cependant davantage sur le  plan stylistique et technique. Les paysages de Samuel Palmer se distinguent ainsi par une sorte  de simplicité innocente, à laquelle est associé un sentiment religieux  visionnaire, dérivé de Blake. John Constable , l'un des premiers peintres à travailler en  plein air, s'éloigne cependant du sentiment d'une nature sauvage au profit  d'une vision fraîche et calme, rendue par l'usage de couleurs lumineuses et  d'une touche audacieuse. Le plus radical de tous les peintres romantiques est Joseph Mallord William Turner . Si ses premiers paysages  rappellent ceux du Lorrain, Turner s'intéresse principalement dans ses œuvres  postérieures aux effets atmosphériques de la lumière et de la couleur, mêlant  nuages, brume, neige et mer en un tourbillon dans lequel tous les éléments se  dissolvent.
 états-Unis
 Le  paysagiste Washington Allston est l'un des premiers peintres à introduire le  romantisme aux états-Unis, mais la manifestation la plus importante du  mouvement reste incarnée par la Hudson River School, qui trouve son inspiration  dans la brutalité sauvage des paysages du nord-est des états-Unis. Son chef de  file, Thomas Cole, peintre d'origine anglaise, représente des forêts primitives  et des montagnes élevées symbolisant la grandeur morale. Son élève Frederick  Edwin Church adaptera le « style » de l'Hudson River School aux  paysages de l'Amérique du Sud, de la Palestine et de l'Europe.
 Le romantisme tardif
 Vers  le milieu du XIXe siècle, la thématique romantique est  délaissée au profit d'autres sujets : d'une part, ceux caractérisés par un  retour à l'Antiquité, et, d'autre part, ceux qui, glorifiant le quotidien  humble et misérable en un genre noble, mettent progressivement en place les  prémices du mouvement réaliste. Parmi les meilleures réussites du romantisme  tardif figurent en France les paysages dits de l' école de Barbizon , avec Camille Corot et  Théodore Rousseau. En Grande-Bretagne, les années 1850 voient l'apparition des  préraphaélites, qui reprennent en quelque sorte à leur compte la  « croisade médiévale » des nazaréens allemands.
 Influence
 L'influence  icturale qu'a exercée, par ailleurs, le romantisme est certaine. On peut ainsi  évoquer une filiation entre Constable et l' impressionnisme par l'intermédiaire de l'école  de Barbizon ; mais l'héritier le plus direct du romantisme est sans doute  le symbolisme qui reprend à sa manière la  subjectivité, l'imagination et l'imagerie fantastique et onirique, propres au  mouvement romantique.
 
 
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